mercredi 25 février 2015

La santé de l'Allemagne, résultat d'une politique de la Demande

Hier, j'entendais de nouveau BFMTV nous servir le couplet habituel sur le succès de l'Allemagne.
Schröder, le commis-voyageur de Gazprom et ami de Poutine, grâce à de courageuses réformes inspirées par Peter Hartz, l'homme condamné en 2008 pour corruption des représentants du personnel de Volkswagen et abus de biens sociaux, s'attaquant à la flexibilité du travail et aux cotisations chômage, aurait remis le pays en route, et Merkel sut poursuivre ces réformes. Le peuple allemand, qui n'est pas râleur, lui, sut soutenir ses réformes en acceptant la modération salariale.
Bon, les chiffres montrent qu'entre ces réformes et le début d'un commencement de succès, il s'est écoulé 6 ans, avec entre-temps la plus grave récession mondiale de l'après-guerre. La modération salariale a surtout provoqué une progression de la pauvreté, qui est plus forte en 2014 qu'en 1998, sans compter l'inégalité croissante entre hommes et femmes.
Les résultats des élections depuis 2005 montrent aussi que les allemands ont fait perdre sa majorité à tous les gouvernements. Schröder perds les élections de septembre 2005, la grande coalition perds sa majorité en 2009, la coalition conservateur-libéraux perds sa majorité en 2013, la grande coalition actuelle serait aussi renvoyée à la maison.
La seule vainqueur dans ce jeu, c'est Merkel, dont le parti conservateur passe de 33% à 42%, retrouvant les scores habituels des conservateurs d'avant 1998, pas non plus le plébiscite dont tout le monde parle.
Le Bundestag de 2013 a d'ailleurs aussi une majorité á gauche si SPD, verts et Linke trouvaient des moyens de collaborer.
Pour des Allemands plébiscitant la politique menée, on a vu mieux. On voit surtout une partie des Allemands, profiteurs du système mis en place, souhaitant sa poursuite contre les intérêts de leurs compatriotes.
On voit d'ailleurs une révolte populiste-nationaliste, anti-européenne, se développer. Le parti AfD est entré au Parlement européen, au Parlement régional de Hambourg, est crédité de voix pour entrer au Bundestag. Cela mettrait fin á toute majorité de gauche au Bundestag.
Dans ce joli récit de BFMTV, la crise de 2008-2009 n'existe plus, elle n'a eu aucun effet, ni conséquences, et les gouvernements n'ont rien fait. Dans ce récit, l'impact démographique, déflationniste, n'a pas de place non plus, ni les effets positifs, pour une économie importatrice de matières premières et exportatrices de produits finis à forte compétitivité hors prix d'une monnaie stable et forte. Dans ce récit, les autres mesures prises depuis la crise, suite à la crise des dettes publiques, depuis la deuxième Grande Coalition n'existent pas.
On ne conserve qu'une chose: Schröder a fait des réformes conformes à la vulgate néolibérale en 2002, et l'Allemagne a eu de bons résultats économiques entre 2010 et 2014.
Pourtant...
Pourtant en 2008 et 2009, l'Allemagne a mené une agressive politique de relance par l'investissement et de maintien du pouvoir d'achat.
Pourtant, l'Allemagne a failli entrer en récession en 2013.
Pourtant, depuis septembre 2013, l'Allemagne, sous la pression du SPD réorienté au centre-gauche, mène une politique de soutien à la demande, avec création du SMIC, relèvement des retraites, et aujourd'hui annoncé, une politique active d'encadrement des loyers.
D'ailleurs, la croissance de 2014 n'est pas le résultat des réformes de 2002.
C'est, d'après Reuters, grâce à la reprise de la consommation des Ménages!
Et pourtant, c'est bien à la reprise d'accords salariaux agressifs que l'on espère le maintien de cette croissance!
D'ailleurs, c'est la seule manière de résorber les déséquilibres provoqués par la balance excédentaire - à plus de 200 Milliards, soit plus que la dette publique grecque - de l'Allemagne! En soutenant une demande et une consommation qui relancera les importations depuis les pays partenaires européens!
La réécriture de l'histoire est toujours l'œuvre de révisionnistes servant un dessein politique. BFMTV et la vulgate libérale française, dont Gallois, tel un nouveau Peter Hartz, est un symbole, comme un Attali, un Macron, sont au service d'intérêts privés. Pas de ceux de la nation.

Avec Maintenant la Gauche, nous proposons un plan de relance depuis l'hiver 2013.
Suivons l'exemple allemand!

Les salaires en hausse, clé de la croissance allemande:
http://fr.reuters.com/ar…/businessNews/idFRKBN0LS0G120150224
La croissance, clé des rentrées fiscales en hausse:
http://www.rp-online.de/wirtschaft/wirtschaft-deutschland-erzielt-18-milliarden-euro-ueberschuss-aid-1.4900058
L'excédent commercial atteint des niveaux inquiétants pour la stabilité de l'Euro:
http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/02/07/l-excedent-commercial-allemand-a-atteint-un-niveau-record-en-2013_4362031_3234.html
L'encadrement des loyers décidé par la Grande Coalition hier:
http://www.faz.net/aktuell/politik/koalition-einig-die-mietbremse-kommt-13448641.html

mardi 24 février 2015

Où va l'Europe?

Le pacte de stabilité qui trouve son origine dans le traité de Maastricht suppose que les États Européens restent dans des marges bien connus.
Ceux-ci, fixés par des experts administratifs, ont reçu la protection du Droit. La politique économique est devenue un sujet de jurisprudence plus qu'un outil positif pour construire un avenir commun.
Pourtant, tous les économistes reconnaissent que les déséquilibres les plus déstabilisants pour une zone monétaire ne sont pas définis par la politique budgétaire.
Dans de grandes zones monétaires relativement homogènes linguistiquement, c'est les migrations internes qui vont rééquilibrer la zone.
Une ville en plein boom attirera les chômeurs d'une zone dévastée, achètera les produits d'autres villes et alimentera ainsi leurs économies.
On comprends qu'un espace aussi complexe, aussi longuement construit, culturellement, linguistiquement, que L'Europe, ne peut pas régler ses problèmes ainsi.
L'exode rural français fut une bonne illustration de ce modèle de rééquilibrage interne.
Aujourd'hui quatres nouvelles se percutent et révèlent à quel point le jurisidisme économique est impuissant à s'attaquer à tous les déséquilibres européens.
L'Allemagne a dégagé en 2014 un surplus budgétaire largement supérieur aux dernières prévisions. Cela démontre par ailleurs l'efficience des inspecteurs des finances allemands, à peu près équivalente à celle des français. Le surplus budgétaire est un déséquilibre ayant aussi des effets négatifs sur une économie.
L'excédent commercial allemand a de nouveau battu un record. Dans le même temps le déficit commercial français hors énergie a aussi battu un record. Ce sont deux déséquilibres de la balance des paiements qui s'expliquent en partie l'un par l'autre.
Enfin, le gouvernement français vient officiellement de reconnaître auprès de la commission l'impossibilité de revenir sous les 3% de déficit avant 2018, ce qui devrait entraîner une procédure contre nous.
Bien sûr il est simpliste de dire que ces excèdents ci sont le reflet de ces déficits là.
Mais il y a une once de vérité dans cette simplicité.
La France va donc être sanctionnée. L'Allemagne elle n'aura droit à aucune remarque.
C'est que le cadre juridique défini ne traite pas d'un niveau maximal d'excédents. Il est légitime juridiquement de s'enrichir sur le dos de ses partenaires et d'utiliser la force du droit pour les sanctionner d'acheter à crédit vos produits.
C'est d'ailleurs ce que L'Allemagne fait en obligeant la Grèce à emprunter pour payer des équipements militaires allemands achetés par un gouvernement grec depuis convaincu de corruption.
Au delà de la condamnation morale d'une telle hypocrisie, on voit surtout la faiblesse intellectuelle de toute L'union sur les questions économiques et monétaires.
Les excèdents commerciaux allemands et japonais déjà desequilibrerent le monde de Bretton Woods, et fut l'un des facteurs de la crise d'inflation des années 70.
Leur résorption ont plongé le Japon dans la déflation, L'Allemagne utilisa ses excèdents pour financer la réunification.
La reconstruction de ce déséquilibre est pourtant la cause la plus profonde de la crise européenne.
Tant que les pays excédentaires n'utiliseront pas leurs excèdents pour relancer leurs demandes intérieures et leurs importations, pour investir dans le soutien de leurs partenaires, L'Europe marchera vers sa fin.

vendredi 13 février 2015

La social-démocratie européenne à la croisée des chemins

Nous sommes à une croisée des chemins.

Les lignes bougent. Au Parlement européen, un rassemblement s'esquisse. L'appel ci-dessous de députés européens issus de la Gauche Européennes, des Verts, du PSE, notamment avec notre Premier Signataire Emmanuel Maurel, montre que ce débat progresse. Le SPD cependant, dont l'aile gauche est pourtant bien représenté au Parlement Européen, n'est pas représenté.

http://www.maintenantlagauche95.org/m/article-125525042.html

Rappelons quelques faits: en 2009, Sigmar Gabriel a lancé une prudente réorientation du SPD - tombé à 20% après Schröder et la première grande coalition - vers la gauche. C'est ce qu'il a formulé en 2011 en "Mitte-links" "au milieu, à gauche", quand Schröder ne parlait que de "Mitte" - du milieu. Cette réorientation prudente permit au SPD de remonter dans les sondages au delà de 25%, et a la direction du SPD de construire une stratégie majoritaire sur l'alliance unique avec les Verts. Le parti restait très divisé entre ceux favorables d'étendre cette alliance aux Linken et ceux voyant plus de points communs avec la CDU.
La désignation obscure de Steinbrück, l'homme le plus à droite du SPD, prit tout le parti a contre-pied. Le résultat fut décevant - 25%, loin des 30 espérés.
Par chance, la stratégie de Merkel, de siphonner les libéraux du FDP - ses anciens alliés- pour obtenir une majorite parlementaire absolue échoua - l'AFD populiste et ses 4,7% en étant pour quelque chose.
Deux possibilités de majorite sont donc possibles au Bundestag : une alliance Linke-Verts-SPD ou la grande coalition que Gabriel décida de faire. Dans un moment de démocratie interne inédit pour le SPD, les militants votèrent sur le contrat de coalition avec la CDU et l'accepteront a 75% de Oui.
Depuis, malgré la mise en place de mesures authentiquement de gauche (ne citons que le SMIC mais il y en a d'autres), le SPD, sans stratégie claire, stagne autour de 25%. La somme des gauches reste stable autour des 43% obtenus en 2013.
Le problème, c'est que si près de 15% des suffrages de 2013 ne sont pas représentés au Bundestag (dispersés sur des partis sous les 5%), il est quasiment sur que l'AfD aura des députés en 2017. La CDU-CSU restant stable à 40% elle pourra choisir son partenaire de coalition entre Verts, SPD ou AfD.
Il y a pourtant au sein de la gauche allemande de plus en plus de voix qui parlent pour une grande coalition de gauche, des Linke au SPD. Même des "réformateurs" SPD commencent à s'interroger sur l'échec de la stratégie de Gabriel, dont la réorientation prudente l'est trop, invisible de l'électeur.
De plus, désemparé, Gabriel tombe dans des réflexes autocratiques, prenant le contre-pied d'une Motion de son parti voté dans une séance qu'il présidait sur le TAFTA, rencontrant et légitimant par la même les populistes de Pegida.
 Le budget allemand va être en équilibre, mais au prix d'un ralentissement de la croissance européenne, d'un retard d'investissements sur les infrastructures considérable, et d'une aggravation de la pauvreté et des inégalités.
L'enjeu d'un nouveau pacte majoritaire à gauche passe donc par une politique active de reprise de l'activité, ce qu'on simplifie sous le nom de politique de croissance même lorsqu'elle implique des investissements massifs pour la transition écologique et vers l'économie durable.
Finalement, la gauche allemande est au même point de débat que toutes les gauches européennes: continuer l'aggiornamento avec les droites et cette grande coalition européenne, austéritaire, injuste, inefficace et donc impopulaire, ou constituer un nouveau pacte majoritaire à sa gauche.
Toute la social-démocratie européenne est devant finalement ce choix : décrépir comme le PASOK, où se transformer comme Syriza.
Rappelons ici que Syriza n'est pas né des partis de la gauche du PASOK, mais d'une scission du PASOK sur cette question du contenu politique du pacte majoritaire et de l'alliance ou non avec les droites.
Notre congrès de Juin 2015 n'est donc pas, comme semble le penser Manuel Valls, le jeu de cinglés dans le bac à sable, mais bien le débat fondamental auquel est confronté l'ensemble de la social-démocratie européenne.
Il est d'ailleurs à ce sujet dommage, mais aussi révélateur, que le congres du PSE qui a lieu la semaine suivant notre congres, n'a dans son programme provisoire aucune trace de ce débat la, ni aucun vote de prévu entre motions et propositions de stratégie différentes.

C'est à nous, socialistes français, de peser sur ce débat en prenant pleinement notre place dans le congrès dePoitiers.

Mathieu Pouydesseau 

jeudi 5 février 2015

Le sursaut Républicain, un coup de jeune pour le socialisme

Le texte intégral de la contribution générale "Le sursaut Républicain, un coup de jeune pour le socialisme" (Maintenant la Gauche) est maintenant disponible.
http://fr.scribd.com/doc/254786531/Contribution-generale-de-Maintenant-La-Gauche-au-Congres-de-Poitiers
Nous défendons une vision volontariste de l'action politique, inscrite dans un union des gauches européennes, porteuse de rapports de force, et ancrée dans les valeurs républicaines. Nous n'acceptons pas qu'un rapport d'expert, fondé sur des théories économiques orthodoxes et libérales, se substitue à la réflexion collective du parti pour devenir la nouvelle feuille de route, sans débat ni cohérence, et depuis 2012, sans résultats à part la montée du Front National.
En voici la table des matières:
I. Les conditions du sursaut
1) Redonner du sens et de la force à la souveraineté populaire
2) Le sursaut républicain implique la rupture avec les politiques d’austérité
3) Le sursaut républicain passe par la réduction des inégalités.
4) Le sursaut républicain, c’est faire avancer les droits des travailleurs
5) La république qui protège : garantir les droits fondamentaux
6) La République qui émancipe : partager les savoirs
7) Un regard lucide sur le monde
8) L’éco-socialisme est l’avenir, pour la planète et pour la gauche
II. Un parti socialiste acteur du sursaut
1) Faire vivre un parti socialiste utile et sûr de lui
2) Engager la rénovation de la gauche Européenne
3) 15 propositions pour la renaissance du PS
4) Le congrès de Poitiers ne sera pas un congrès comme les autres

Dans la parti rénovation du Parti, je vous propose notamment la réflexion sur le point numéro 5 issu d'un de mes amendements, qui fait la synthèse d'une réflexion plus profonde, et qui fut aussi abordé pendant les réunions de samedi dernier à Paris de la FFE:
"La fédération des français de l’étranger est une richesse méconnue du Parti qui doit davantage solliciter l’expertise de ses militants. Si ses militants le souhaitent, nous pourrions créer une fédération des français en Union Européenne et une fédération des français hors de l’UE, permettant un travail spécifique du secrétariat national à l’Europe avec l’une et à l’international avec l’autre."

Voici une revendication que je porte depuis longtemps reprise par cette contribution générale:
" Si les socialistes européens veulent sortir de l’impasse politique, il est urgent d’engager un dialogue structurel avec les nouvelles forces de gauche ou celles qui ont su se renouveler alors que nous n’arrivions pas à le faire.
Nous devons mettre fin au « compromis historique » avec les anciens démocrates-chrétiens, devenus conservateurs. Nous devons nous rapprocher du Parti de la Gauche européenne, et des Écologistes. Seule cette option nous permet de rendre crédible la perspective d’une alternative politique européenne.
Nous devons révolutionner le PSE qui n’est pas à la hauteur des enjeux ; le PS français doit assumer de porter les débats que les sociaux-démocrates n’osent pas affronter. Les militants doivent être convoqués pour se prononcer sur l’orientation politique du PSE et ses dirigeants."


Mathieu Pouydesseau
BF, CF, mandataire Fédéral